Né en 1909 : Stephen Spender


Livre du Bicentenaire (Coiffard, 2008)

200 ans d'histoire - copie

L’Anthologie

Auteur : Joël Barreau

 

 

Stephen Spender

 

Stephen Spender âgé - extrait

 

Poète, critique et journaliste anglais de grand renom, anobli en 1983, Sir Stephen Spender est né à Londres en 1909.

A 18 ans, devenu orphelin de père et de mère, il est envoyé à Nantes par sa grand-mère, d’origine allemande, pour lui faire apprendre le français, épisode de sa vie qu’il a raconté dans son Autobiographie 1909-1950 publiée en 1951, éditée en français seulement en 1995, l’année même de sa mort :

 

Spender Autobiographie

 

Il s’agissait pour mon aïeule d’une décision terrible. La France représentait à ses yeux l’ennemi ancestral de tous nos parents allemands (…) En outre elle tenait les Français pour des gens immoraux. Toutefois elle se souvint bientôt de l’existence de quelques quakers français qui avaient fait partie du comité d’aide aux Viennois. Elle se renseigna et apprit que Nantes, la capitale du protestantisme français, était agréable et tout à fait différente de Paris. Ses amis quakers m’obtinrent une chambre dans la maison d’un pasteur et de sa femme.

 

C’est ainsi que le jeune Stephen Spender fut accueilli, à Nantes, chez le pasteur Emmanuel Brunet, aumônier de la petite communauté protestante du Lycée Clemenceau. Inscrit, à compter du 3 mai 1927, dans la classe de 1ère B du lycée, il suit, dans les matières littéraires, les mêmes cours que les élèves de 1ère A, parmi lesquels se trouve Louis Poirier, le futur Julien Gracq. Du cours séjour qu’il fit au Lycée Clemenceau, il a laissé un bref mais très intéressant témoignage :

 

Je suivis des cours d’histoire du Lycée Clemenceau, alors que le professeur abordait les guerres napoléoniennes. A chaque fois qu’il devait mentionner une défaite anglaise, il se tournait vers moi, s’inclinait et s’excusait de la vérité déplaisante que son devoir l’obligeait à exprimer.

Devant moi, les lycéens français, obéissant fiévreusement à l’idée que ma grand-mère se faisait d’eux, se passaient en cachette des coupures de journaux traitant des maladies féminines et de menstruation. Tout à mon idéalisme hypocrite, j’oubliais mes propres fantasmes et me sentais envahi d’un indicible dégoût.

En m’envoyant à Nantes, mon aïeule avait à coup sûr triomphé. Elle m’avait guéri de la France pour de longues années. Elle m’avait enseigné cette vérité importante : la France, Paris excepté, est le pays le plus bourgeois du monde.

 

Voir dans « Julien / Biographies » la notice consacrée à Stephen Spender